top of page

Tiers-Lieu - La Grande Coco avec Jeanne Tonneau

Entre le 190 rue de Belleville et le 69 rue Pixérécourt, se trouve une rue qui ne porte pas son nom par hasard : la rue du Soleil. Sa belle exposition abrite un site rempli d’histoire, qui s’apprête aujourd’hui à entamer une nouvelle vie, grâce à une équipe tout aussi éclectique que complémentaire active autour du projet de La Grande Coco.

Direction le numéro 29, en compagnie de Jeanne Tonneau, coordinatrice et membre de ce joli chantier qui croit en une ville plus vivante et innovante.


C’est dans ce bâtiment construit dans les années 1920, qui accueillait jusqu’au début des années 2000, une fabrique de fleurs en tissu pour des maisons de Haute Couture, que prend place le projet de la Grande Coco, lauréat de l’appel à projets "Inventons la métropole du Grand Paris” en 2017.

Le site industriel d’environ 1000m2 encore imprégné de son charme passé, pourra bientôt voir fleurir différents espaces où institutions, entrepreneurs, chercheurs, architectes, paysagistes, urbanistes, ingénieurs en environnement, associations et habitants du quartier se partageront un lieu porteur d’innovation sociale, technologique et environnementale autour de la transformation de la ville.

Avant que le chantier de rénovation ne s’amorce très bientôt, Lueur Vive vous propose de découvrir les coulisses de ce bel élan collectif qui avant son ouverture prévu en 2023 propose régulièrement des ateliers, projections et rencontres ouverts à tous.




Présentez-nous l’histoire de votre lieu et la naissance de La Grande Coco ?

Les motivations du collectif citoyen de la Grande Coco sont multiples et s’entremêlent. Le point de départ est la volonté de poursuivre et d’amplifier les dynamiques positives et innovantes initiées dans les bureaux que nous partageons à Pantin depuis 2012 en tant que professionnels d’un même secteur, celui de la transformation innovante de la ville.

En partageant un espace de travail nous avons déjà expérimenté la notion et la pratique de la mise en commun de nos compétences pour faire naître des projets innovants. Nous avons aussi partagé des moments de convivialité grâce à des repas concoctés dans la cuisine partagée, au centre de la vie des bureaux : lieu de partage des repas, salle de réunion, bibliothèque, pépinière improvisée… .

Ces temps d’échanges se sont révélés extrêmement bénéfiques dans le cadre de nos activités. Au travers du projet de La Grande Coco, nous souhaitons élargir cette dynamique en accueillant de nouvelles compétences dans un lieu dédié à la ville et à sa transformation, mais aussi créer un espace de convivialité porteur de sens et ancré dans le nord est parisien, un territoire dans lequel nous sommes déjà impliqués personnellement et professionnellement.





Le projet prend racine dans une ancienne usine de confection de fleurs textiles d’environ 1000m², qui fera l’objet d’une réhabilitation, d’une déconstruction partielle et d’une extension. Un bail à construction de 45 ans installe le projet dans le territoire sur le temps long, tout en assurant le retour du lieu dans la sphère publique une fois le bail arrivé à terme. Garantissant un modèle vertueux de réactivation du lieu sans pour autant sacrifier le patrimoine public à long terme.

La notion d’intérêt général se trouve au centre de notre projet et se traduit notamment via la présence sur site des Restos du Cœur, déjà implantés dans le lieu depuis une décennie, dont l’activité est pérennisée dans le projet, couplée à la proximité immédiate d’un quartier politique de la ville, à moins de 100 mètres du quartier Compans-Pelleport.





Votre projet a la particularité de s’appuyer sur un bail à construire plutôt que sur une cession immobilière. Quel est le type de votre structure, comment fonctionne-t-elle et par qui est-elle gérée ?


Le projet est porté par 3 structures distinctes mais qui rassemblent toujours plus ou moins les mêmes acteurs du collectif. La structure qui porte le bail à construction est une société civile immobilière, que l’on pourrait nommer de classique.

Êtes-vous une structure indépendante et faites-vous partie d’un réseau de lieux, formel ou informel ?


Un peu des deux, nous avons pris accroche avec le réseau À + c’est mieux, réseau tête de file des tiers-lieux pour l’ensemble de l’Île-de-France. Cependant pour l’instant notre positionnement au sein de ce réseau n’est pas encore très établi. Quand viendra le temps de l’exploitation du bâtiment nous pourrons plus certainement affiner notre positionnement sur les questions des réseaux.





Quelles pistes d'activités souhaitez-vous développer autour des " nouvelles manières de faire la ville " ?


La période de préfiguration a commencé en septembre 2019. Dans un premier temps, nous avons dû réaliser des travaux de mise en sécurité du site. Puis l’enjeu a été de se faire connaître dans le quartier, ce que nous avons peu à peu réussi à faire grâce à des événements mensuels, ainsi qu’à une programmation spontanée assez variée qui a pu émerger des associations du quartier. L’idée pour nous était de proposer une page blanche et de voir ce qui allait s’y écrire selon les sollicitations que nous allions avoir. Ainsi, nous avons pu comprendre plus finement les besoins de notre quartier, les propositions des associations du quartier (quelles soient anciennes ou émergentes) et affiner la programmation de notre Tiers-Lieu.



Exposition nocturne Coco Light, par le collectif @la_debride, @nosi_ohne, @0raphaele0

avec l'aide d'@adrien_gelin et mis en lumière par @vivian_daval, dans le cadre de la Nuit Blanche 2021


Quelles thématiques souhaitez-vous en particulier soutenir et proposer au public ?


Dans la version finale du projet les thématiques principales seront :

Les manières de faire la ville différemment, de façon plus inclusive socialement et sobre environnementalement. De cette grande thématique découle beaucoup de sous idée, par exemple l’agriculture urbaine ou encore la question du réemploi des matériaux de construction.

Les questions culturelles et d’ouverture au quartier, notamment via la programmation culturelle ouverte de la cantine, l’espace du lab et les studios de répétition.

L’alimentation est aussi au coeur de nos questionnements et sous plusieurs formes : le repas est pour nous un moment important et fédérateur du collectif, une denrée essentielle (ce que la présence des Restos du Coeur dans le projet nous rappelle chaque jour), mais aussi un levier vers une transformation écologique et sociale de nos société : comment proposer des espaces de bien manger mais accessibles à tous, comment créer des filières courtes d’approvisionnement… . Mais nous pourrions en rajouter encore beaucoup, le vélo, la musique… .

Dans la phase de préfiguration nous avons déjà permis l’installation du ciné club Angelika!, réalisé des ventes de plantes avec Pépins Production, proposé des cours de yoga à bas prix, permis à des professionnels de la ville de faire des réunions, accueilli un chantier d’insertion, accueilli également un workshop pour les étudiants de l’école d’architecture de Belleville sur les questions de réemploi… .

Nous tissons petit à petit la programmation vers laquelle nous souhaitons tendre.





Quelles valeurs défendez-vous et de quelle manière vos actions ont-elles un impact sur le territoire ?


Nous défendons des valeurs d’ouverture, de partage, de sobriété environnementale, du changement par le faire et par le faire ensemble dans la mesure du possible, d’ancrage au quartier et au territoire.


Comment définiriez-vous votre lieu ? L’associerez-vous à un " Tiers-Lieu " ?


C’est un lieu en construction, qui se veut ouvert, c’est aussi un lieu de travail et de recherche pour les professionnels, tout autant qu’un lieu pour les voisins du quartier ! la multitude de définitions qui sont associées au terme de Tiers-Lieu et les multiples interprétations qu’en ont les acteurs rendent parfois le positionnement compliqué. Si l’on entend par " Tiers-Lieu " un endroit qui croise plusieurs activités, plusieurs publics, ouvert sur son quartier et portant des valeurs de solidarité et de sobriété, alors La Grande Coco est un Tiers-Lieu.

Le problème de la notion de “Tiers-Lieu” est quelle est maintenant reprise pour des projets tellement différents aux valeurs parfois très éloignées, qu’il devient difficile de vouloir être rassemblés sous un même label.





Les profils des résidents/fondateurs sont-ils homogènes ou éclectiques ? Et en quoi est-ce un projet expérimental, fertile à de nouvelles synergies ?


Les profils des fondateurs et des futurs occupants des espaces de bureau sont assez homogènes : membres de petites structures travaillant dans le secteur de la fabrique de ville et portant l’envie de faire différemment. Mais les personnalités sont très éclectiques !

Les autres futurs occupants ont des statuts différents : cantine associative et Restos du Coeur notamment.

Le projet se veut fertile car il porte en lui la volonté de créer un lieu où se croiseront ceux qui vivent, ceux qui pensent et ceux qui font la ville. Par se croisement nous espérons que des modes de fabrication de la ville plus ancrés pourront émerger.





Quelles difficultés rencontrez-vous ? Pour quand le début des travaux est-il prévu et pour quelle durée ?

Nous avons rencontré une multitude de difficultés qui sont notamment dû au fait que nous soyons un collectif de citoyens souhaitant porter un projet en autopromotion et cela sous la forme d’un bail à construction. L’addition de ces trois particularités ont fait de nous un “mouton à cinq pattes", qui n’entre dans aucune des cases pré-établies des financeurs, investisseurs, assureurs et autres services de la ville.

Le début des travaux est prévu pour l’automne 2021 et durera 24 mois.





Dans votre démarche de revalorisation éco-responsable d’un espace historique, quels aménagements prévoyez-vous ? La structure va t’elle être complètement modifiée ou souhaitez-vous garder des éléments en mémoire du lieu ?


Notre action sur le bâtiment se scindera entre une partie de réhabilitation sur le bâtiment donnant sur rue et une partie de construction neuve en structure bois paille du coté du fond de la parcelle.

Nous souhaitons effectivement pouvoir réemployer le plus de matériaux possible, pour cela nous avons inclus ce volet dans l’ensemble des études de maitrise d’oeuvre, mais aussi dans les contrats que l’on a passé avec les entreprises qui réaliseront.

Nous avons notamment travaillé avec Depuis 1920, spécialistes de réemploi, ou encore réalisé un workshop avec des étudiants de l’école de Belleville. Dont une partie des travaux sont maintenant exposés à La Grande Coco.

Un travail fin sur les questions d’isolation et de ventilation est aussi mené. Nous allons notamment réaliser un workshop sur la réalisation d’un enduit en paille et plâtre.

D’un point de vue esthétique nous allons garder des traces de l’histoire du lieu, mais également redonner son éclat à la façade historique du bâtiment.






Il y a t’il des connexions actuelles ou de prévues avec des structures du quartier de Belleville ? Avez-vous mis des partenariats en place ?


Les deux confinements ont pas mal entravé le développement de nos partenariats, cependant nous avons pu tisser des liens réguliers et d’autres plus ponctuels, comme le résume le schéma ci-dessous.



Quelles vocations auront les différents espaces ? Comment visualisez-vous la cohabitation des différentes domaines d’activités/profils du lieu pour le rendre intelligible et ouvert à tous ?

Voici comment seront réparties les activités dans les différents espaces. Il y a une sorte de gradation du bas vers le haut, les espaces du bas donnant sur rue étant les plus ouverts au grand public, les deux étages du haut sont des espaces de bureau, et le premier étage sera ouvert selon les activités qui y seront développées.



Quels types de structures aimeriez-vous inciter à vous contacter pour de futures collaborations ?


Nous sommes ouverts à toutes les structures pour pouvoir discuter et voir ce que l’on pourrait faire ensemble. Cependant l’approche du début du chantier va probablement bouleverser les équilibres qui s’étaient installés.


Que pouvons-nous vous souhaiter en cet automne 2021 ?


Le 29 septembre dernier nous avons signé notre bail à construction avec la ville de Paris, ce qui nous donne le droit de commencer les travaux !

Les travaux commenceront début novembre (la nuit blanche était un peu notre dernière ouverture de taille). J'imagine que pour la fin de l'année 2021 on peut nous souhaiter un chantier qui se déroule sans accros ou mauvaises surprises.




Propos recueillis et photographies par Elise Beltramini

 


La Grande Coco

29 Rue du Soleil

75020 Paris




bottom of page